Affaire C‑548/12
Marc Brogsitter
contre
Fabrication de Montres Normandes EURL etKarsten Fräßdorf
(demande de décision préjudicielle, introduite par le Landgericht Krefeld)
«Espace de liberté, de sécurité et de justice — Compétence judiciaire en matière civile et commerciale — Règlement (CE) no 44/2001 — Compétences spéciales — Article 5, points 1 et 3 — Action en responsabilité civile — Nature contractuelle ou délictuelle»
Sommaire – Arrêt de la Cour (septième chambre) du 13 mars 2014
Coopération judiciaire en matière civile – Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale – Règlement no 44/2001 – Dispositions de ce règlement qualifiées d’équivalentes à celles de la convention de Bruxelles – Interprétation desdites dispositions conformément à la jurisprudence de la Cour relative à la convention (Convention du 27 septembre 1968; règlement du Conseil no 44/2001) Coopération judiciaire en matière civile – Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale – Règlement no 44/2001 – Compétences spéciales – Compétence en matière délictuelle ou quasi délictuelle – Notion – Action en responsabilité ne relevant pas de la matière contractuelle [Règlement du Conseil no 44/2001, art. 5, points 1, a), et 3] Coopération judiciaire en matière civile – Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale – Règlement no 44/2001 – Compétences spéciales – Compétence en matière contractuelle – Notion – Action en responsabilité civile de nature délictuelle en droit national – Inclusion – Condition – Manquement aux obligations contractuelles compte tenu de l’objet du contrat [Règlement du Conseil no 44/2001, art. 5, points 1, a), et 3]
Voir le texte de la décision. (cf. point 19) Voir le texte de la décision. (cf. point 20) Des actions en responsabilité civile de nature délictuelle en droit national doivent être considérées comme relevant de la matière contractuelle, au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles, telles qu’elles peuvent être déterminées compte tenu de l’objet du contrat. En effet, la seule circonstance que l’une des parties contractantes intente une action en responsabilité civile contre l’autre ne suffit pas pour considérer que cette action relève de la matière contractuelle au sens de cet article. À cet égard, le comportement reproché peut être considéré comme un tel manquement aux obligations contractuelles si l’interprétation du contrat qui lie le défendeur au demandeur apparaît indispensable pour établir le caractère licite ou, au contraire, illicite du comportement reproché au premier par le second. À défaut, pour la juridiction de renvoi, de pouvoir déterminer que la cause d’une demande en réparation peut être raisonnablement regardée comme une violation des droits et des obligations du contrat qui lie les parties, les actions du demandeur doivent être considérées comme relevant de la matière délictuelle ou quasi délictuelle, au sens de l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001. (cf. points 23-27, 29 et disp.)
Document number
-
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:148
-
Celex-Nr.: 62012CJ0548
Authentic language
-
Authentic language: allemand
Dates
-
Date of document: 13/03/2014
-
Date lodged: 30/11/2012
Classifications
-
Subject matter
-
Directory of EU case law
Miscellaneous information
-
Author: Cour de justice
-
Country or organisation from which the decision originates: Allemagne
-
Form: Arrêt
Procedure
-
Type of procedure: Recours préjudiciel
-
Judge-Rapportuer: Bonichot
-
Advocate General: Jääskinen
-
Observations: Portugal, EUMS, Commission européenne, EUINST
-
National court:
- *A9* Landgericht Krefeld, Beschluss vom 27/09/2012 (12 O 28/12)
- *P1* Landgericht Krefeld, Urteil vom 26/08/2014 (12 O 28/12)
Legal doctrine
12. Brammsen, Joerg ; Apel, Simon: „Kunst kommt von Können …“, Wettbewerb in Recht und Praxis 2016 p.18-24 (DE)
6. Dickinson, Andrew: TOWARDS AN AGREEMENT ON THE CONCEPT OF 'CONTRACT' IN EU PRIVATE INTERNATIONAL LAW?, Lloyd's Maritime and Commercial Law Quarterly 2014 p.466-474 (EN)
8. Wendelstein, Christioph: Wechselseitige Begrenzung von Vertrags- und Deliktsgerichtsstand im Rahmen des europäischen Zuständigkeitsrechts, Zeitschrift für europäisches Privatrecht 2015 p.624-636 (DE)
13. Pfeiffer, Thomas: Deliktsrechtliche Ansprüche als Vertragsansprüche im Brüsseler Zuständigkeitsrecht – vorfragenakzessorische Qualifikation der Hauptfrage?, Praxis des internationalen Privat- und Verfahrensrechts 2016 p.111-114 (DE)
4. Baumert, Andreas J.: Vertragsgerichtsstand bei zugleich als Vertragsverletzung anzusehendem Deliktsvorwurf („Brogsitter“), Entscheidungen zum Wirtschaftsrecht 2014 p.435-436 (DE)
11. Reydellet, Colin: Leçon 2 : De la matière délictuelle et de sa qualification....., Revue Lamy droit des affaires 2016 nº 111 p.33-36 (FR)
3. Idot, Laurence: Compétences spéciales, Europe 2014 Mai Com. nº 5 p.49 (FR)
10. Brosch, Marlene: Die Brogsitter-Defence, Österreichische Juristenzeitung 2015 p.958-960 (DE)
7. Haftel, Bernard: Du 13 mars 2014 - Cour de justice de l'Union européenne - Aff. C-548/12, Revue critique de droit international privé 2014 nº 4 p.867-876 (FR)
1. Sujecki, Bartosz: EuGVVO: Gerichtliche Zuständigkeit für Klagen aus deliktsrechtlichen Ansprüchen zwischen Vertragspartnern, Europäische Zeitschrift für Wirtschaftsrecht 2014 p.384-385 (DE)
2. Wendenburg, Albrecht ; Schneider, Maximilian: Vertraglicher Gerichtsstand bei Ansprüchen aus Delikt?, Neue juristische Wochenschrift 2014 p.1633-1636 (DE)
5. Dornis, Tim W.: Von Kalfelis zu Brogsitter - Künftig enge Grenzen der Annexkompetenz im europäischen Vertrags- und Deliktsgerichtsstand, Zeitschrift für Gemeinschaftsprivatrecht 2014 p.352-354 (DE)
9. Strikwerda, L.: Verzoek om een prejudiciële beslissing krachtens art. 267 VWEU, ingediend door het Landgericht Krefeld (Duitsland) bij beslissing van 27 september 2012. EEX-Verordening. Bevoegdheid. Civielrechtelijke aansprakelijkheidsvordering; vordering uit onrechtmatige daad in de zin van art. 5 punt 3 of vordering uit overeenkomst in de zin van art. 5 punt 1?; autonome uitlegging, Nederlandse jurisprudentie ; Uitspraken in burgerlijke en strafzaken 2015 nº 1 p.3-5 (NL)
Relationship between documents
- Treaty: Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (version consolidée 2008)
-
Case affecting:
Affects Legal instrument Provision Interprète 32001R0044 A05PT1LA -
Instruments cited:
Legal instrument Provision Paragraph in document 41968A0927(01) A05PT3 N 19 41968A0927(01) A05PT1 N 19 61987CJ0189 N 20 62000CJ0167 N 21 32001R0044 A02P1 N 4 32001R0044 A05PT1LB N 28 32001R0044 N 19 32001R0044 A01P1 N 3 32001R0044 A05PT1LC N 28 32001R0044 A05PT3 N 18 - 20 27 32001R0044 A05 N 5 32001R0044 A05PT1 N 1 14 15 32001R0044 A05PT1LA N 16 18 - 20 23 27 - 29 62007CJ0533 N 28 62012CJ0009 N 28 62012CJ0147 N 18 19
ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)
13 mars 2014 (*1)
«Espace de liberté, de sécurité et de justice — Compétence judiciaire en matière civile et commerciale — Règlement (CE) no 44/2001 — Compétences spéciales — Article 5, points 1 et 3 — Action en responsabilité civile — Nature contractuelle ou délictuelle»
Dans l’affaire C‑548/12,
contre
LA COUR (septième chambre),
composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, MM. J.‑C. Bonichot (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,
avocat général: M. N. Jääskinen,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 novembre 2013,
considérant les observations présentées:
|
— |
pour M. Brogsitter, Rechtsanwalt, représenté par lui-même, |
|
— |
pour Fabrication de Montres Normandes EURL et M. Fräβdorf, par Me A. Mansouri, Rechtsanwalt, |
|
— |
pour le gouvernement portugais, par M. L. Inez Fernandes et Mme S. Nunes de Almeida, en qualité d’agents, |
|
— |
pour la Commission européenne, par M. W. Bogensberger et Mme A.‑M. Rouchaud-Joët, en qualité d’agents, |
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
|
1 |
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, point 1, du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1). |
|
2 |
Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Brogsitter, domicilié à Kempen (Allemagne), à Fabrication de Montres Normandes EURL (ci‑après «Fabrication de Montres Normandes»), société établie à Brionne (France), et à M. Fräβdorf, domicilié à Neuchâtel (Suisse), au sujet d’actions introduites par M. Brogsitter à diverses fins en raison de préjudices qu’il aurait subis du fait d’agissements considérés comme étant constitutifs de concurrence déloyale. |
|
3 |
L’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 44/2001 prévoit: «Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne recouvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives.» |
|
4 |
L’article 2, paragraphe 1, du règlement n o 44/2001 prévoit: «Sous réserve des dispositions du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre.» |
|
5 |
L’article 5 du règlement n o 44/2001 prévoit: «Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite, dans un autre État membre:
[…]
[…]» |
|
6 |
Il ressort de la décision de renvoi que M. Brogsitter commercialise des montres de luxe. En 2005, il a conclu un contrat avec un maître horloger, M. Fräβdorf, résidant alors en France, en vertu duquel ce dernier s’est engagé à développer des mouvements d’horlogerie pour des montres de luxe, destinées à être commercialisées en série, pour le compte de M. Brogsitter. M. Fräβdorf a exercé son activité auprès de Fabrication de Montres Normandes, société dont il était l’associé unique et le gérant. Depuis 2010, M. Fräβdorf est domicilié en Suisse. |
|
7 |
M. Brogsitter aurait assumé l’ensemble des frais financiers afférents à la création des deux mouvements d’horlogerie faisant l’objet de ce contrat. |
|
8 |
Outre les travaux relatifs à ces deux mouvements, M. Fräβdorf et Fabrication de Montres Normandes auraient également créé, en parallèle, d’autres mouvements d’horlogerie ainsi que des boîtiers et des cadrans, qu’ils auraient présentés pour leur compte au salon mondial de l’horlogerie de Bâle (Suisse) au cours des mois d’avril et de mai de l’année 2009. Ils les auraient commercialisés en leur nom et pour leur compte, assurant la publicité de ces produits sur un site Internet en langues allemande et française. |
|
9 |
M. Brogsitter soutient que, par ces dernières activités, les défendeurs ont violé leurs engagements contractuels. Selon lui, M. Fräβdorf et Fabrication de Montres Normandes s’étaient engagés à travailler exclusivement pour son compte et ne pouvaient, dès lors, ni développer ni exploiter, en leur nom et pour leur compte, des mouvements d’horlogerie, qu’ils soient identiques ou non à ceux ayant fait l’objet de ce contrat. |
|
10 |
M. Brogsitter demande la cessation des activités litigieuses ainsi que l’octroi de dommages et intérêts au titre de la responsabilité délictuelle de ses cocontractants, sur le fondement, dans le cadre de la législation allemande, de la loi contre la concurrence déloyale (Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb) et de l’article 823, paragraphe 2, du code civil (Bürgerliches Gesetzbuch), en faisant valoir que, par leurs agissements, les défendeurs ont violé le secret des affaires, désorganisé son entreprise ainsi que commis une fraude et un abus de confiance. |
|
11 |
Les défendeurs ont conclu au rejet du recours. Ils ont également formé une demande reconventionnelle dans le cadre de laquelle ils ont fait valoir que les mouvements de calibre litigieux présentent, en tout état de cause, une construction différente de celle ayant fait l’objet du contrat et qu’ils n’étaient pas couverts par un droit d’exclusivité. Les défendeurs soulèvent également une exception d’incompétence tirée de ce que seules les juridictions françaises seraient territorialement compétentes, au titre de l’article 5, point 1, du règlement no 44/2001, pour connaître de l’ensemble des demandes formulées par M. Brogsitter, dès lors que tant le lieu d’exécution de la prestation objet du contrat litigieux que celui du fait générateur du soi‑disant dommage seraient situés en France. |
|
12 |
Fabrication de Montres Normandes a, en cours d’instance, été mise en liquidation judiciaire. Le liquidateur, nommé en France, a autorisé les mandataires des défendeurs à poursuivre l’instance. |
|
13 |
Il ressort également de la décision de renvoi que l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) s’est déjà prononcé en appel, dans un arrêt du 5 octobre 2011, sur un premier jugement du Landgericht Krefeld qui s’était déclaré territorialement incompétent. L’Oberlandesgericht Düsseldorf a estimé que la juridiction de première instance tirait sa compétence internationale, à l’égard du litige pendant devant elle, de l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001, pour connaître des seules demandes en responsabilité civile de nature délictuelle formulées par M. Brogsitter. Les autres demandes relèveraient, en revanche, de la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, de ce règlement, et devraient être portées devant une juridiction française. |
|
14 |
Le Landgericht Krefeld demande toutefois si, compte tenu des circonstances de l’espèce, et, notamment, de l’existence d’un contrat entre les parties au litige, les actions en responsabilité dont il est saisi ne devraient pas également être considérées comme relevant de la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, du règlement no 44/2001, et ressortir plutôt à la compétence d’une juridiction française. |
|
15 |
Dans ce contexte, le Landgericht Krefeld a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante: «Convient-il d’interpréter l’article 5, point 1, du règlement [no 44/2001] en ce sens qu’un demandeur qui prétend avoir subi un préjudice du fait d’un comportement [constitutif de concurrence déloyale] relevant de la matière délictuelle en vertu du droit allemand et commis par le cocontractant de celui-ci établi dans un autre État membre invoque également des droits relevant de la matière contractuelle à l’encontre dudit cocontractant, même s’il fonde son action sur une base juridique relevant de la responsabilité civile délictuelle?» |
|
16 |
Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si des actions en responsabilité civile, telles que celles en cause au principal, de nature délictuelle en droit national, doivent néanmoins être considérées comme relevant de la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001, compte tenu du contrat qui lie les parties au principal. |
|
17 |
À titre liminaire, il convient de rejeter comme non fondée l’exception d’irrecevabilité soulevée par M. Brogsitter, selon laquelle cette question est dénuée de pertinence dès lors que la juridiction de renvoi devrait, en tout état de cause, être considérée comme territorialement compétente en vertu de l’article 5, point 1, sous b), du règlement no 44/2001, qui vise les contrats de vente de marchandises, ou de l’article 5, point 3, de ce règlement. En effet, une telle argumentation porte uniquement sur l’interprétation qu’il convient de donner aux dispositions du droit de l’Union en cause dans l’affaire au principal et, partant, ne constitue pas une cause d’irrecevabilité de la question posée à titre préjudiciel. |
|
18 |
Il convient ensuite de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que les termes de «matière contractuelle» et de «matière délictuelle ou quasi délictuelle», au sens, respectivement, des points 1, sous a), et 3 de l’article 5 du règlement no 44/2001, doivent être interprétés de façon autonome, en se référant principalement au système et aux objectifs de ce règlement, en vue d’assurer l’application uniforme de celui-ci dans tous les États membres (voir, notamment, arrêt du 18 juillet 2013, ÖFAB, C‑147/12, point 27). Ils ne sauraient, dès lors, être compris comme renvoyant à la qualification que la loi nationale applicable donne au rapport juridique en cause devant la juridiction nationale. |
|
19 |
Par ailleurs, dans la mesure où le règlement no 44/2001 remplace, dans les relations entre les États membres, la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle que modifiée par les conventions successives relatives à l’adhésion des nouveaux États membres à cette convention (ci-après la «convention de Bruxelles»), l’interprétation fournie par la Cour en ce qui concerne les dispositions de la convention de Bruxelles vaut également pour celles de ce règlement, lorsque les dispositions de ces instruments peuvent être qualifiées d’équivalentes (arrêt ÖFAB, précité, point 28). Il en va ainsi des points 1, sous a), et 3 de l’article 5 de ce règlement par rapport, respectivement, aux points 1 et 3 de l’article 5 de la convention de Bruxelles (voir, en ce sens, arrêt ÖFAB, précité, point 29). |
|
20 |
À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que la «matière délictuelle ou quasi délictuelle», au sens de l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001, comprend toute demande qui vise à mettre en jeu la responsabilité d’un défendeur et qui ne se rattache pas à la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), de ce règlement (voir en ce sens, notamment, arrêt du 27 septembre 1988, Kalfelis, 189/87, Rec. p. 5565, point 17). |
|
21 |
Afin de déterminer la nature des demandes en responsabilité civile portées devant la juridiction de renvoi, il importe, dès lors, de vérifier dans un premier temps si celles-ci revêtent, indépendamment de leur qualification en droit national, une nature contractuelle (voir, en ce sens, arrêt du 1er octobre 2002, Henkel, C-167/00, Rec. p. I-8111, point 37). |
|
22 |
Il ressort de la décision de renvoi que les parties en cause au principal sont liées par un contrat. |
|
23 |
Pour autant, la seule circonstance que l’une des parties contractantes intente une action en responsabilité civile contre l’autre ne suffit pas pour considérer que cette action relève de la «matière contractuelle» au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001. |
|
24 |
Il n’en va ainsi que si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles, telles qu’elles peuvent être déterminées compte tenu de l’objet du contrat. |
|
25 |
Tel sera a priori le cas si l’interprétation du contrat qui lie le défendeur au demandeur apparaît indispensable pour établir le caractère licite ou, au contraire, illicite du comportement reproché au premier par le second. |
|
26 |
Il appartient, dès lors, à la juridiction de renvoi de déterminer si les actions intentées par le requérant au principal ont pour objet une demande de réparation dont la cause peut être raisonnablement regardée comme une violation des droits et des obligations du contrat qui lie les parties au principal, ce qui en rendrait indispensable la prise en compte pour trancher le recours. |
|
27 |
Si tel est le cas, ces actions se rattachent à la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001. À défaut, elles doivent être considérées comme relevant de la «matière délictuelle ou quasi délictuelle», au sens de l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001. |
|
28 |
Il importe également de relever que, dans la première hypothèse, la compétence territoriale en matière contractuelle devra être déterminée conformément aux critères de rattachement définis par l’article 5, point 1, sous b), du règlement no 44/2001 si le contrat en cause au principal est constitutif d’un contrat de vente de marchandises ou de fournitures de services au sens de cette disposition. Ainsi que le prévoit l’article 5, point 1, sous c), du règlement no 44/2001, ce n’est en effet que dans l’hypothèse où un contrat n’entre dans aucune de ces deux catégories qu’il convient de déterminer la compétence judiciaire conformément au critère de rattachement prévu à l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001 (voir, en ce sens, arrêts du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C-533/07, Rec. p. I-3327, point 40, ainsi que du 19 décembre 2013, Corman‑Collins, C‑9/12, point 42). |
|
29 |
Par conséquent, il convient de répondre à la question posée que des actions en responsabilité civile telles que celles en cause au principal, de nature délictuelle en droit national, doivent, néanmoins, être considérées comme relevant de la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001, si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles, telles qu’elles peuvent être déterminées compte tenu de l’objet du contrat. |
|
30 |
La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. |
|
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit: |
| Des actions en responsabilité civile telles que celles en cause au principal, de nature délictuelle en droit national, doivent, néanmoins, être considérées comme relevant de la «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles, telles qu’elles peuvent être déterminées compte tenu de l’objet du contrat. |
|
Signatures |
Source
-
EUR-Lex
EUR-Lex is a legal portal maintained by the Publications Office with the aim to enhance public access to European Union law.
Except where otherwise stated, all intellectual property rights on EUR-Lex data belong to the European Union.
© European Union, http://eur-lex.europa.eu/, 1998-2015 Link to document text: http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX:62012CJ0548





